Le drame de Heysel
La tragédie du stade Heysel (Belgique) marque le début d’un combat contre les violences dans les stades. Le 29 mai 1985, les hooligans anglais et les supporters italiens s’affrontent lors du match entre Liverpool et la Juventus. On recensera 39 morts et plus de 400 blessés. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a régi à ce drame en adoptant le 19 août 1985 une convention européenne sur la violence et les débordements de spectateurs lors de manifestations sportives et notamment de matches de football.
Par ce texte, les parties s’engagent à déployer des dispositifs de prévention et de sanctions aux violences physiques émanant de spectateurs. Des mesures toujours en vigueur y sont prévues telles que la séparation des supporters en tribune et l’interdiction de stade pour les fauteurs de trouble.
La première réaction française
Les débordements du 28 août 1993 entre CRS et supporters lors de la rencontre PSG-Caen ont poussé le gouvernement français à encadrer les rencontres sportives. La volonté des CRS de contrer un possible envahissement de terrain s’est soldée par de violents affrontements avec les Kop of Boulogne.
La loi no 93-1282 du 6 décembre 1993 relative à la sécurité des manifestations sportives, dite « loi Alliot-Marie » est adoptée en réponse à la montée de l’hooliganisme. La ministre des sports de l’époque a souhaité instaurer un cadre juridique spécifique aux infractions réalisées dans les enceintes sportives. Ce texte demeure encore aujourd’hui le socle du cadre légal contre les violences réalisées dans les stades.
Les nouvelles mesures interdisent notamment aux personnes en état d’ivresse de pénétrer dans les enceintes, mais également l’introduction d’armes et d’engins pyrotechniques. Par ailleurs, en cas de flagrant délit, les coupables pourront faire l’objet d’une comparution immédiate.
L’évolution du cadre législatif et réglementaire
L’introduction des ces textes n’a malheureusement pas empêché les supporters de commettre des délits. Les débordements incessants lors des évènements sportifs ont conduit les instances européennes et nationales à faire évoluer le cadre légal.
Nous pouvons recenser quelques textes importants tels que :
- La décision du Conseil de l’Union européenne du 25 avril 2002 qui impose aux États la création de points nationaux d’information du football, chargés de recenser les incidents ;
- La résolution Conseil de l’UE du 29 avril 2004 qui prévoit un programme de lutte contre le hooliganisme ;
- La loi n°2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers qui autorise les interdictions administratives de stade ;
- L’arrêté du ministre de l’intérieur du 5 septembre 2007 qui créée le Ficher national des interdits de stade (FNIS), regroupant les identités des interdictions judiciaires et administratives ;
- La loi no 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure permettant au ministre de l’intérieur d’interdire le déplacement individuel ou collectif ;
- La loi no 2016-564 du 10 mai 2016 qui renforce le dialogue avec les supporters et la lutte contre l’houliganisme et responsabilise les clubs ;
- Le décret n°2021-551 du 4 mai 2021 portant publication de la convention du Conseil de l’Europe sur une approche intégrée de la sécurité, de la sûreté et des services lors des matches de football et autres manifestations sportives, signée à Saint-Denis le 3 juill. 2016).
Les sanctions
Les spectateurs de rencontres sportives doivent par conséquent respecter les règles en vigueur, au risque de voir leurs responsabilités civiles et pénales engagées.
LES PEINES PRINCIPALES
Délits |
Textes |
Sanctions |
Introduction et tentative d’introduction de boissons alcooliques dans une enceinte sportive |
Article L.332-3 du Code du sport | 1 an d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende |
Etat d’ivresse |
Article L.332-4 du Code du sport | 7 500 euros d’amende |
Provocation à la haine ou à la violence | Article L.332-6 du Code du sport | Un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende |
Idéologie raciste et xénophobe | Article L.332-7 du Code du sport | Un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende |
Jets de projectiles présentant un danger pour la sécurité des personnes | Article L.332-9 du Code du sport | Trois ans d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende |
Trouble et atteinte à la sécurité des personnes et des biens
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Article L.332-10 du Code du sport | Un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende |
Outrage public aux symboles nationaux
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Article 433-5-1 du Code pénal | 7 500 euros d’amende |
A noter que, dans la pratique, il n’est pas rare que le club porte plainte et se constitue partie civile contre un supporter commettant de tels agissements.
LES PEINES COMPLEMENTAIRES
Le juge peut prononcer des peines complémentaires (en plus de la prison et des amendes). Ces interdictions judiciaires, d’une durée maximale de 5 ans, concernent les infractions visées aux articles 222-11 à 222-13, 322-1 à 322-4, 322-6, 322-11 et 433-6 du Code pénal, aux articles L. 332-3 à L. 332-10 et L. 332-19 du Code du sport.
Les supporters risquent de se retrouver dans l’impossibilité de pénétrer dans l’enceinte où se déroule la manifestation sportive mais également de se rendre aux abords de cette enceinte afin de ne pas perturber l’entrée ni la sortie du stade (article L.332-11 du Code du sport).
LES INTERDICTIONS ADMINISTRATIVES
La loi n°2006-64 du 23 janvier 2006 autorise le préfet à prononcer des interdictions administratives de maximum 24 mois à l’encontre d’une personne constituant une menace pour l’ordre public.
Par ailleurs, aux termes de l’article L.332-16 du Code du sport, le représentant de l’État peut également imposer « à la personne faisant l’objet de cette mesure l’obligation de répondre, au moment des manifestations sportives objets de l’interdiction, aux convocations de toute autorité ou de toute personne qualifiée qu’il désigne », à condition que la mesure soit proportionnée.
Dans la pratique, ces sanctions se traduisent par des interdictions de déplacement de supporter sur ordre du ministre de l’intérieur ou les préfets (article L. 332-16-1 et L. 332-16-2) ; ou bien encore par la dissolution ou la suspension d’activité d’associations de supporters (article L. 332-18).
LE REGLEMENT DE LA FEDERATION FRANCAISE DE FOOTBALL
Le législateur n’est pas le seul à être intervenu. La Fédération française de football prévoit elle aussi des mesures et sanctions pouvant être prononcées par la commission de discipline de la Ligue de football professionnel. Le règlement de la Fédération lui permet de sanctionner les clubs dont les supporters provoquent des incidents par un blâme, une amende ou encore des matchs à huit clos total ou partiel.